LE PROCÈS D’ACHAT DE L’AVION PRÉSIDENTIEL ET DES ÉQUIPEMENTS MILITAIRES ENTRE DANS UNE PHASE DÉCISIVE: VERS DES AUDITIONS CROISÉES APRÈS LA COMPARUTION DE L’ANCIEN PREMIER MINISTRE OUMAR TATAM LY !

L’emblématique procès dit de « l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires » entre dans un tournant décisif avec l’audition des témoins clés. Devant une cour déterminée à faire toute la lumière sur cette affaire qui défraie la chronique au Mali depuis quelques années, comparaissait en visioconférence l’ancien Premier ministre Oumar Tatam Ly.
De l’avis de tous les observateurs, cette audition marque une avancée significative dans la manifestation de la vérité, après celles de Moussa Mara et de Madani Touré, respectivement ancien Premier ministre et ministre délégué au Budget. La déposition de l’ancien chef du gouvernement au moment des faits a, sans doute, permis de lever le voile sur certains aspects obscurs du processus décisionnel ayant conduit à l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires. Selon ses déclarations faites vendredi dernier, l’initiative de l’achat de l’avion présidentiel émanait du président IBK luimême. Et en sa qualité de chef du gouvernement à l’époque, il avait plutôt recommandé la location d’un appareil.
Une suggestion que le président IBK n’aurait pas retenue, d’après les explications de l’ancien Premier ministre, qui est revenu longuement sur le déroulement du processus, auquel il n’avait pas été associé, du fait de son opposition à l’achat dans un contexte économique difficile pour le pays.
Ce fut également l’occasion pour Oumar Tatam Ly de démontrer, face à la cour, comment il avait été écarté des différentes implications dans ces dossiers d’envergure, alors même qu’il devait en être le chef d’orchestre. Il ressort de ses propos que le processus d’acquisition des équipements militaires a été conduit de bout en bout sans sa réelle participation. Lors des échanges avec les membres de la cour, il a insisté sur un aspect fondamental en matière de marchés publics : les contrats de plus de 80 milliards de francs CFA, relevant des intérêts essentiels de l’État, doivent normalement être délibérés en Conseil des ministres, même s’ils sont classés secret-défense. L’ancien chef du gouvernement assure avoir plaidé, sans succès, auprès du président de la République pour le renvoi du ministre de la Défense et de son collègue de l’Économie et des Finances. Concernant la garantie de 100 milliards de francs CFA, il a affirmé devant la cour qu’il n’appartient pas à l’État d’assurer la garantie d’un fournisseur dans le cadre d’un marché public.
Lors de cette comparution par visioconférence, Oumar Tatam Ly, témoin clé dans cette affaire, a été sans ambiguïté dans ses déclarations : « Le secret-défense ne saurait être opposé à un Premier ministre », a-t-il affirmé sans sourciller.
Ces propos apparaissent comme une déposition à décharge et une clarification des faits. Ils ont permis de révéler des manquements dans le processus d’acquisition de l’avion présidentiel et des équipements militaires. Cette audition, après celles de Moussa Mara et de Madani Touré, a sans doute mis en lumière un manque de transparence et des violations des règles de passation des marchés publics. Après cette comparution, nul doute que la suite du procès s’annonce capitale, avec des auditions croisées dans l’espoir de faire toute la lumière sur ce dossier aux contours jusqu’ici flous.
Tout, dans ce sulfureux dossier dit de l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires, démontre que la bataille juridique s’annonce complexe. La défense de Madame Bouaré Fily Sissoko a donc du pain sur la planche. Dans cette phase décisive du procès en cours, elle devra surtout faire preuve de tact pour tenter de sortir sa cliente des griffes de la justice. ■
LAYA DIARRA