ME MOUNTAGA TALL PARLE : «LES MALIENS SOUFFRENT, ET SE TAIRE FACE À CETTE RÉALITÉ REVIENDRAIT À CAUTIONNER L’INSUPPORTABLE »

La situation du Mali, sur les plans économique et sécuritaire, est préoccupante. Si certains Maliens font bon cœur contre mauvaise fortune, d’autres commencent à prendre leur courage à deux mains pour dire haut ce qu’ils pensent. C’est le cas de l’ancien ministre et député, Me Mountaga Tall. Dans une déclaration, l’avocat et ancien président de parti politique a été on ne peut plus explicite.

Au-delà des affirmations, accusations, dénégations ou explications, il estime qu’il est indéniable que le Mali traverse aujourd’hui des moments difficiles, à bien des égards inédits. « Les Maliens souffrent», dit-il, et se taire face à cette réalité reviendrait à cautionner l’insupportable, voire à faire preuve d’irresponsabilité. Pour autant, ajoute Me Tall, la parole ne doit pas en rajouter aux épreuves déjà lourdes à porter. C’est pourquoi il en appelle à la lucidité, à l’ouverture et au rassemblement. D’abord, la lucidité. Pour l’ancien député et ancien ministre, elle exige de regarder la réalité en face, sans déni, tout en saluant la résilience admirable de nos compatriotes. Mais il reconnaît aussi qu’une résilience interminable peut se transformer en résignation, laquelle peut ouvrir la voie à la révolte, pouvant elle-même conduire à la répression. « Ayons pleinement conscience de ce risque et veillons à le conjurer », prévient-il. Vient ensuite l’ouverture. Celle-ci implique, selon lui, d’accepter de dialoguer avec ceux de nos compatriotes qui ont pris les armes, afin de mettre un terme au bain de sang que connaît le pays. Il rappelle que dialoguer ou négocier « ne signifie en aucun cas capituler », ajoutant que toute négociation doit être méthodiquement préparée en se posant les questions essentielles : avec qui négocier ? Quand ? Où ? Sur quoi ? Quelle équipe de négociateurs constituer ? Quels argumentaires développer ? Quelles lignes rouges fixer ?

Ce dialogue, déjà recommandé par plusieurs foras dont les Assises nationales de la Refondation (ANR), doit accompagner l’action militaire grâce à une riposte doctrinale claire, une lutte résolue contre les injustices, la corruption, ainsi que des actions de développement tangibles au niveau local, souligne celui qui a plusieurs fois été candidat à l’élection présidentielle.

Il plaide également pour le réchauffement et le renforcement des relations avec tous les voisins du Mali, en veillant à ce que la souveraineté ne rime pas avec repli sur soi. Enfin vient le temps du rassemblement. Selon l’ancien député de Ségou, c’est par le rassemblement qu’un peuple éprouvé révèle sa grandeur et sa capacité à relever les défis. Rassembler les Maliennes et les Maliens consiste notamment à : assurer la cohésion au sein de l’institution militaire; permettre à la société civile d’exercer librement son rôle de sentinelle ; prendre des mesures concrètes et visibles contre la vie chère, les coupures de courant, la pénurie de carburant, le chômage, notamment des jeunes ; restaurer les partis politiques et œuvrer, de façon consensuelle, à leur rationalisation et à leur moralisation, comme recommandé par les ANR ; libérer les détenus dont la privation de liberté ne repose que sur l’expression d’opinions ou de points de vue; favoriser le retour des exilés non poursuivis par la justice et donner des garanties d’impartialité à ceux qui le sont. Ce faisant, explique Me Tall, le Mali doit sortir d’une stratégie de gestion de crise qui, en aucun cas, ne peut perdurer, sans compter la perte de temps, de ressources, d’énergie et de vies humaines qu’elle entraîne. Il précise que ses propos ne sont pas de circonstance.

Ils procèdent de convictions fortes et réitérées, notamment dans ses tweets des 14 juin et 23 juillet 2025, ainsi que dans d’autres déclarations plus anciennes. Mais ils restent actuels et opportuns, conclut Me Mountaga C. Tall, ancien ministre, ancien député à l’Assemblée nationale du Mali, ancien député au Parlement de la CEDEAO et au Parlement panafricain. ■

LAYA DIARRA