L’ANCIEN PREMIER MINISTRE OUMAR TATAM LY L’A CONFIÉ À LA COUR D’ASSISES : « MA RELATION AVEC MME BOUARÉ F. SISSOKO ÉTAIT DIFFICILE. JE N’AI JAMAIS ÉTÉ INFORMÉ DE L’ACHAT DES ÉQUIPEMENTS MILITAIRES. J’AI EU CONNAISSANCE DU CONTRAT PAR VOIE DE PRESSE. »

 L’ANCIEN PREMIER MINISTRE OUMAR TATAM LY L’A CONFIÉ À LA COUR D’ASSISES : « MA RELATION AVEC MME BOUARÉ F. SISSOKO ÉTAIT DIFFICILE. JE N’AI JAMAIS ÉTÉ INFORMÉ DE L’ACHAT DES ÉQUIPEMENTS MILITAIRES. J’AI EU CONNAISSANCE DU CONTRAT PAR VOIE DE PRESSE. »

Après la comparution de l’ancien ministre délégué au Budget, Madani Touré, c’était au tour de l’ancien Premier ministre Oumar Tatam Ly de répondre aux questions des juges de la Cour d’assises, le vendredi 20 juin 2025, par visioconférence, dans le cadre du procès relatif à l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires.

M. Tatam Ly a affirmé n’avoir jamais été associé ni informé des modalités d’acquisition de l’avion présidentiel ni de celles des équipements militaires avant sa démission. Il a précisé que cette décision relevait exclusivement du président de la République. « L’option que j’avais proposée au Président était celle de la location. Il l’a refusée, préférant l’achat », a-t-il déclaré, ajoutant qu’il existait selon lui un conflit d’intérêts dans le processus d’acquisition de l’avion. « Celui qui a procédé aux visites techniques de l’ancien appareil est le même qui a géré l’achat du nouveau. Ce n’est pas normal », a-t-il insisté, en citant nommément Marc Gaffazoli. Concernant les équipements militaires, l’ancien Premier ministre a déclaré avoir appris l’existence du contrat par voie de presse. « Je n’ai jamais été impliqué dans le dossier. Le ministre de la Défense ne m’en a jamais parlé. J’ignorais les modalités d’exécution et n’ai découvert l’émission d’un mandat à Sidi Mohamed Kagnassy qu’après mon départ », a-t-il expliqué. Il dit avoir pris connaissance du mandat à la lecture du rapport du Vérificateur général, qui mentionne l’ancien chef de cabinet de la présidence, Mahamadou Camara. M. Ly a également évoqué ses relations tendues avec les ministres Soumeylou Boubèye Maïga (Défense) et Bouaré Fily Sissoko (Économie et Finances), qu’il considère comme l’un des éléments ayant conduit à sa démission au bout de sept mois à la primature.

« Je n’avais aucune visibilité sur les activités du ministère des Finances. À l’époque, la transparence aurait dû être la règle. Je travaillais avec les ministres disponibles. J’avais de réelles difficultés à collaborer avec ceux de la Défense et de l’Économie. Si le président avait accepté un remaniement, ces deux ministres auraient quitté le gouvernement. Il s’y est opposé.

Ces affaires ont contribué à ma décision de partir », a-til confié. Il a par ailleurs souligné que le « secret défense » ne saurait s’appliquer au Premier ministre, estimant donc anormal qu’on lui ait caché des informations aussi sensibles. Il a précisé que les ministres concernés l’avaient seulement informé de l’existence des dossiers, sans lui fournir de détails. « J’avais le sentiment qu’on me cachait quelque chose. J’en ai parlé au président, qui s’est montré surpris. J’ai eu l’impression d’avoir été dupé. La transparence est, à mes yeux, essentielle pour une bonne gouvernance », a-t-il soutenu. À propos de la lettre d’intention, M. Ly a précisé qu’il n’en a pris connaissance qu’après son départ. « J’ai reçu une copie par mail, mais jamais en tant que courrier officiel », a-t-il indiqué. Un autre point important selon lui : la garantie autonome de 100 milliards de francs CFA, déposée par l’État à la Banque Atlantique dans le cadre du contrat militaire. Il estime anormal qu’un État, après avoir conclu un contrat avec un fournisseur censé mobiliser lui-même les fonds, lui accorde en plus une garantie. « C’est une situation irrégulière », a-t-il affirmé.

En réponse, les avocats de la défense ont souligné que M. Tatam Ly parle d’illégalité, alors qu’il n’a lui-même jamais présenté sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale durant ses sept mois au pouvoir.

Pour sa part, Mme Bouaré Fily Sissoko a justifié l’achat de l’avion par l’insuffisance du budget de la présidence, estimé à deux milliards de francs CFA, alors que la location coûtait environ 300 millions par mois. « Tous les actes que nous avons posés étaient conformes à la loi », a-t-elle déclaré. Évoquant leur mauvaise entente, elle a ajouté : « Le Premier ministre avait demandé au ministre délégué au Budget de rédiger un rapport contre moi pour convaincre le président de me faire quitter le gouvernement. Je ne savais pas que je le dérangeais à ce point. » M. Tatam Ly a répliqué : « Je n’ai aucune rancune envers qui que ce soit, mais notre mauvaise relation a bel et bien eu un impact sur la gouvernance. » ■

YOUSSOUF KONATE

Sarah TRAORE

Related post

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

error: Content is protected !!