LES COLONELS ÉLEVÉS À TITRE EXCEPTIONNEL AU RANG DE GÉNÉRAUX : UNE PROMOTION MÉRITÉE ?
Le chef de l’État, le désormais Général Assimi Goïta, ainsi que cinq (5) autres figures clés de l’armée malienne, ont été promus du rang de colonels à celui de généraux à titre exceptionnel, comme l’a décidé le Conseil des ministres du mercredi 16 octobre 2024.
Cependant, malgré les congratulations émis par les uns et les autre, une question se pose : cette promotion, qui renforce la position des leaders militaires, dont le président de la transition, est-elle méritée ? Parmi les promus figurent le colonel Sadio Camara, ministre de la Défense et des Anciens combattants ; le colonel Malick Diaw, président de l’organe législatif de la transition ; le colonel-major Ismaël Wagué, ministre de la Réconciliation ; et Modibo Koné, chef des services de renseignements, sont élevés au rang de généraux de corps d’armée. Le colonel Abdoulaye Maïga, porte-parole du gouvernement, accède quant à lui au grade de général de division.
Ces nominations ont toutes été faite à titre exceptionnel. Depuis l’annonce, chacun y va de son commentaire.
« Cette promotion est largement méritée et s’inscrit dans la lignée des recommandations des diverses assises nationales, y compris le Dialogue inter-malien », affirment certains Maliens. En revanche, cette promotion attriste l’ancien Premier ministre Moussa Mara, pour deux raisons : « Se gratifier ou se récompenser soi-même diminue fortement le mérite. Il aurait été plus indiqué de laisser cette décision à d’autres », a-t-il déclaré. Moussa Mara souligne également qu’en ces temps difficiles pour les finances publiques, il aurait été souhaitable que les autorités fassent preuve de sensibilité envers les souffrances des Maliens en évitant des actions qui augmentent les charges pour le Trésor public. Assimi Goïta, en particulier, est devenu président de la transition après avoir dirigé le coup d’État.
Il a été au centre des efforts pour rétablir la sécurité dans le pays, confronté à des défis majeurs, notamment le terrorisme et l’instabilité politique. Ces promotions militaires peuvent être interprétées comme une reconnaissance des sacrifices consentis par ces officiers. Sur le plan politique, le leadership de ces officiers a permis l’adoption d’une nouvelle Constitution, rétablissant les fondements juridiques du pays et marquant un tournant décisif dans le processus de transition. Sous leur impulsion, la lutte contre la corruption a été intensifiée, avec des résultats concrets salués par les populations. Cette rigueur morale a restauré la confiance des citoyens dans les institutions publiques. Leurs efforts se sont également étendus au secteur éducatif, qu’ils ont su pacifier après des années de perturbations. La création de l’Alliance des États du Sahel (AES), dont le Mali est membre fondateur, témoigne également de leur vision.
Ces colonels ont œuvré pour la réhabilitation des légitimités traditionnelles en accordant un rôle central aux chefs coutumiers et religieux dans la stabilisation sociale du pays.
La guerre contre le terrorisme, le départ de la France et de la mission onusienne, le retrait des forces du G5 Sahel, ainsi que la reprise de Kidal, sont autant d’actions qui plaident en faveur de ces colonels, perçus comme les libérateurs d’un peuple assujetti et soumis aux caprices de bandits et traîtres à la patrie, qui avaient fait de la région de Kidal un « pays » dans l’État du Mali. Si la promotion de ces officiers au grade supérieur s’inscrit dans la droite ligne des recommandations du Dialogue inter-malien, on est en droit d’espérer que la voie est désormais tracée pour aller vers des élections et un retour à l’ordre constitutionnel normal. C’est également sur ce point que les Maliens attendent le président Goïta et ses frères d’armes. ■
LAYA DIARRA