ASSIMI GOÏTA À MOSCOU: UNE AUTRE DIMENSION DANS LA COOPÉRATION RUSSO-MALIENNE : LA RUSSIE EST-ELLE POUR AUTANT UN PARTENAIRE FIABLE ?

A Moscou depuis dimanche, dans le cadre d’une visite officielle en Fédération de Russie, le Président de la Transition, le Général d’Armée Assimi Goïta, et la délégation qui l’accompagne sont depuis engagés dans des discussions avec les autorités russes sur des sujets d’intérêt commun, notamment le renforcement des liens dans les domaines du commerce, de l’économie, des investissements, de la sécurité, de l’éducation, de l’énergie et de la coopération humanitaire.
Cette visite consacre donc une autre dimension dans la coopération russo-malienne. Mais au-delà des engagements souscrits de part et d’autre, se pose une question : la Russie est-elle un partenaire fiable ? Le Président de la Transition, le Général d’Armée Assimi Goïta, a été reçu lundi au Kremlin par Vladimir Poutine, Président de la Fédération de Russie. Cette rencontre de haut niveau s’inscrivait dans le cadre du renforcement des relations bilatérales entre le Mali et la Russie. Le Général d’Armée Assimi Goïta a eu des échanges approfondis avec son homologue russe en vue de promouvoir un partenariat fécond, au service de la paix, de la sécurité et du progrès partagé. Un tête-à-tête suivi d’une séance de travail élargie aux membres des délégations des deux pays. Dans son adresse de bienvenue, le Président Poutine a salué les relations historiques et solides qui unissent les deux pays depuis l’établissement de leurs relations diplomatiques il y a 65 ans.
Il a souligné la continuité de la coopération dans plusieurs domaines, notamment la formation de plus de 10 000 cadres maliens en Russie, tout en exprimant sa volonté d’approfondir davantage les relations bilatérales à travers de nouveaux projets conjoints.
« Nous avons désormais des perspectives intéressantes dans plusieurs secteurs, y compris l’exploitation des ressources naturelles, l’énergie, la logistique et la coopération humanitaire. La visite officielle du Président Goïta marque une étape importante dans le développement de notre partenariat stratégique », a déclaré le Président Poutine. En réponse, le Président Assimi Goïta a exprimé sa gratitude pour l’accueil chaleureux qui lui a été réservé, tout en réaffirmant la volonté du Mali de renforcer ses liens de coopération avec la Russie. « Notre coopération couvre de nombreux secteurs. Grâce à ce partenariat, nous avons enregistré des résultats tangibles. Cette visite officielle contribuera à approfondir davantage nos relations dans un esprit de confiance mutuelle et de respect de la souveraineté », a déclaré le Président Assimi Goïta. Ces échanges de haut niveau ont permis de passer en revue l’état de la coopération bilatérale et d’explorer de nouvelles perspectives de partenariat stratégique entre le Mali et la Russie. Des questions régionales et internationales d’actualité ont également été abordées.
À l’issue de la rencontre, les deux parties ont procédé à la signature de plusieurs documents de coopération, notamment dans les domaines du commerce, de l’économie et de la logistique, consolidant ainsi le cadre juridique et institutionnel de leur partenariat.
Cette visite s’inscrit également dans la dynamique d’un Mali souverain, qui entend diversifier ses partenariats stratégiques pour répondre aux aspirations légitimes de son peuple à la paix, à la stabilité et au développement durable. Toujours dans le cadre du renforcement de la coopération bilatérale entre la République du Mali et la Fédération de Russie, trois accords ont été signés le lundi 23 juin 2025 à Moscou, en présence du Président de la Transition, le Général d’Armée Assimi Goïta, et de son homologue russe, Vladimir Poutine de la Fédération de Russie. Des accords qui portent sur les domaines du commerce, de l’énergie, des sciences, ainsi que sur les fondements des relations politiques, diplomatiques et sécuritaires entre les deux États. Le premier accord signé concerne la création d’une Commission intergouvernementale russo-malienne sur la coopération commerciale, économique, scientifique et technique. Ce cadre structurant vise à approfondir les échanges entre les deux pays et à favoriser l’émergence de projets conjoints à forte valeur ajoutée. À moyen et long terme, cet instrument juridique ouvre la voie à des investissements russes dans des secteurs clés du développement malien, tout en facilitant l’accès du pays aux technologies de pointe et aux marchés russes.

De surcroît, il s’inscrit dans la vision souveraine d’une diplomatie multipolaire prônée par les plus hautes autorités de la Transition. Il pourrait également encourager un soutien accru de la Russie aux positions du Mali au sein des instances internationales. Dans le même esprit de coopération stratégique, un second projet d’accord a été conclu dans le domaine de l’utilisation de l’énergie atomique à des fins pacifiques, en partenariat avec la société d’État russe ROSATOM. Ce partenariat innovant pourrait apporter une réponse structurelle à la crise énergétique que connaît le Mali, à travers le développement d’infrastructures adaptées, le transfert de compétences et de technologies, ainsi que la formation de ressources humaines nationales. En renforçant ainsi l’autonomie énergétique du pays et en réduisant sa dépendance aux importations onéreuses, cet accord contribuera de manière significative au développement industriel et à la souveraineté énergétique nationale. Par ailleurs, les deux parties ont procédé à la signature d’un troisième accord portant sur les fondements des relations bilatérales entre le Mali et la Fédération de Russie. Cet accord, à portée générale, témoigne d’une volonté commune d’inscrire le partenariat dans une dynamique durable, fondée sur le respect mutuel, la non-ingérence et la solidarité dans les forums internationaux. Il ouvre également la voie à une coopération renforcée dans le domaine de la sécurité, notamment en matière de lutte contre le terrorisme et le crime organisé.
À ce titre, il prévoit des mécanismes de formation, la fourniture d’équipements et un appui opérationnel structuré, consolidant ainsi les capacités nationales de défense et de sécurité. Dans leur ensemble, ces accords traduisent une volonté politique affirmée de hisser la coopération entre le Mali et la Russie à un niveau stratégique.
Ils renforcent surtout la souveraineté et l’autonomie du Mali dans les domaines clés du développement, de l’énergie et de la sécurité. La signature de ces instruments juridiques constitue un tournant majeur dans les relations entre Bamako et Moscou, en faveur d’un Mali fort, souverain et résolument tourné vers l’avenir. La fiabilité de la Russie en cause ? Si Bamako et alliés de l’AES semblent convaincus du partenariat avec la Russie, présenté depuis le début des régimes transitoires dans les pays de l’AES, beaucoup se posent cependant la question de savoir si le pays de Vladimir Poutine est un partenaire fiable. Ils partent du postulat selon lequel la Russie a toujours été prompte à lâcher certains de ses alliés de longues dates, notamment Bachar Al Assad de la Russie finalement chassé du pouvoir en Syrie, ou encore le lâchage récent de l’Iran sous les coups de boutoir des bombes israéliennes et américaines.
Si les partisans du Kremlin n’ont jusqu’ici pu donner une explication claire dans la gifle infligée à Bachar Al Assad faute de soutien de son partenaire russe, Vladimir Poutine lui-même a tenté de justifier son inaction face au conflit opposant l’Iran aux États-Unis et à Israël, malgré les liens historiques étroits entre la Russie et Téhéran, par la présence significative de populations russophones en Israël.
Une vue d’esprit, le Président américain Donald Trump ne s’étant pas embarrassé des détails du genre pour voler au secours de Israël, allié des Etats-Unis. Plus récent encore et chez-nous en plus, on aura constaté un silence assourdissant observé dans la crise opposant le Mali à l’Algérie, suite à la destruction d’un drone FAMA par l’Algérie. Une raffinerie d’or, en partenariat avec la société russe Yadran, dont l’objectif serait l’affirmation de notre souveraineté économique, les appuis en matière de défense, y compris la présence de Africa Corps au Mali, serviront à quoi le jour où notre pays est menacé par l’OTAN ou une puissance, si le partenaire stratégique russe décide de ne pas bouger le petit doigt ? N’est-ce pas qu’il urge que nous sortions d’un tel endoctrinement pour s’ouvrir aux autres dans un monde multipolaire ? ■
MAÏMOUNA DOUMBIA