L’ETAT MALIEN, DÉSORMAIS SEUL ACTIONNAIRE DE LA MINE D’OR DE MORILA: LES TRAVAILLEURS DOIVENT-ILS SE FAIRE DES SOUCIS ?

La mine d’or Morila au Mali appartient désormais à l’État. C’est ce qui ressort d’un communiqué publié, le vendredi 31 janvier 2025, par l’australien Firefinch, qui a annoncé la cession de sa participation de 80 % dans la mine au gouvernement, déjà propriétaire des 20 % d’intérêts restants. Une bonne ou mauvaise nouvelle ?
En tout cas pas pour les gens qui y travaillent, selon certains observateurs, l’Etat malien ayant la réputation de mauvais gestionnaire, comme le prouvent d’ailleurs chaque année les différents rapports des structures de contrôle ! C’est en mai 2024, nous apprend-t-on, que les deux parties ont conclu un accord aux termes duquel la compagnie minière publique malienne, la Société de Recherche et d’Exploitation des Ressources Minérales du Mali (SOREM), devait prendre le contrôle de l’actif. Mais un litige financier entre l’un des sous-traitants de la mine et Firefinch serait venu retarder la conclusion de l’opération. En novembre 2024, Firefinch a finalement annoncé le retrait de la plainte déposée par son ancien partenaire, permettant à la transaction d’être bouclée.
Avec cette acquisition, la SOREM ajoute à son portefeuille un actif hébergeant plus de 3 millions d’onces (85 tonnes) d’or, selon une estimation publiée en septembre 2022 par Firefinch. Exploitée depuis 2000, la mine était considérée en fin de vie par ses précédents propriétaires (Barrick Gold et AngloGold Ashanti), qui l’ont vendue en 2020 à Firefinch.
Malgré des plans de relance prometteurs, cette société australienne n’a cependant pas réussi à prospérer avec cet actif. Selon les spécialistes, il faudra attendre les prochains mois pour voir le sort qui est réservé à Morila. Dotée d’un capital de 100 millions FCFA à sa création, la SOREM est notamment chargée d’exploiter les mines du portefeuille de l’État. Le gouvernement a déjà annoncé en octobre 2024 le transfert à la SOREM d’une autre mine considérée en fin de vie et acquise par l’État auprès d’AngloGold et du canadien Iamgold. Selon toujours les spécialistes des questions économiques, si les plans du gouvernement réussissent, la SOREM devrait permettre que l’or du pays « brille davantage pour tous les Maliens », notamment à travers la hausse des revenus que le gouvernement tire du secteur.
Mais cet optimisme n’est pas partagé par tous les maliens, à cause des tares qui gangrènent la gestion des structures relevant de l’Etat malien, avec son corollaire de corruption, de concussion, d’affairisme…
« Nous connaissons déjà les traitements infligés aux maliens qui travaillent dans les mines par les managers maliens, en complicité souvent avec certaines structures de défense des droits des travailleurs. Si Firefinch se retire, ça craint vraiment pour les travailleurs de la mine de Morila », nous confie un ancien travailleur de mine. Beaucoup doutent que l’or du Mali « brille davantage pour tous les Maliens », le secteur minier, principalement dominé par l’exploitation du métal jaune, représentant près de 80 % des exportations et 22 % des revenus de l’État malien, alors que les citoyens maliens manquent de tout, jusqu’au strict minimum vital ! ■
MAÏMOUNA DOUMBIA