SILENCE SUR LA SITUATION DES LEADERS POLITIQUES INCARCÉRÉS : DE QUOI LA CLASSE POLITIQUE MALIENNE A-T-ELLE PEUR ?
Trois mois après la levée de la mesure d’interdiction des activités des partis politiques, et plus de quatre mois que 11 leaders politiques croupissent en prison, les maliens commencent à s’interroger sur le silence assourdissant de la classe politique malienne sur ce sujet. De quoi a-telle peur, ce d’autant que la mesure de suspension a été levée ?
Serait-elle à la conclusion qu’elle n’a plus un rôle à jouer dans la vie publique au Mali ? Ce qui est sûr, c’est que ce silence contribue à consolider la thèse de ceux qui travaillent depuis le coup d’Etat du 18 août 2020, à déconstruire la classe politique et les acquis de la démocratie avec ! Comme disait un confrère de la place, la plupart des leaders restent dans l’ombre, absents des débats publics, souffrant d’une perte de popularité auprès de l’opinion générale. Les partis politiques semblent en effet avoir déserté l’animation de la vie publique, une attitude qui serait dictée par divers facteurs contextuels alimentant le débat sur la survie des partis et l’avenir du système démocratique au Mali. Mais est-il bienséant pour un «accusé» de se confondre en silence au lieu de se défendre ? «Les partis politiques, autrefois très vocaux dans leur opposition à l’interdiction de leurs activités, ont durement critiqué la décision prise par le gouvernement le 10 avril 2024. Ils réclamaient sans cesse la levée de cette mesure, qui empêchait toute forme d’activité politique, tant pour les partis que pour les associations politiques. Cependant, depuis que les autorités de la Transition ont fait marche arrière et levé cette interdiction, le 10 juillet dernier, les partis politiques, loin de se précipiter pour occuper à nouveau l’espace, semblent fonctionner au ralenti, suscitant des interrogations sur leur stratégie et leurs priorités», note le confrère.
Imputer ce silence et cette inaction à une quelconque forme de solidarité avec les 11 leaders politiques arrêtés en juin et incarcérés depuis ne saurait s’expliquer, car c’est bien justement depuis la levée de la suspension des activités politiques que les leaders arrêtés ont besoin du soutien de la classe politique dans son ensemble.
On pensait au départ que c’est parce qu’une médiation était en cours, avec notamment l’entrée des leaders religieux dans la danse, et surtout le fait que le juge d’instruction en charge du dossier avait ordonné leur liberté provisoirement avant le veto du procureur… mais le problème semble bien être ailleurs. Malheureusement, cette attitude de la classe politique ne fait que conforter davantage les lobbyistes qui travaillent à ce qu’elle meurt de sa belle mort, avec des messages de haines et de déconstruction savamment orchestrés, tendant à faire émerger dans l’opinion que tous maux et autres travers dans notre pays sont de la seule responsabilité des acteurs politiques qui sont aujourd’hui pointés du doigt étant des corrompus qui bâtis leur prestige sur le dos du peuple malien.
Les acteurs politiques maliens sont-ils consentants qu’on leur présente sous cette posture au Mali ? Sinon, il est temps qu’ils se réveillent enfin, et pour la libération de leurs camarades incarcérés, et pour l’animation du débat national pour la sauvegarde de la patrie qui va à vau-l’eau. Si oui, alors s’en est fini pour la démocratie et l’état de droit au Mali ! ■
MAIMOUNA DOUMBIA