DÉPART DÉFINITIF DE TOTAL ENERGIES DE NOTRE PAYS : PRÉMICES D’UNE MIGRATION DES INVESTISSEURS ÉTRANGERS HORS DU MALI ?

Ce qui se tramait depuis quelques mois se concrétise : la société française TotalEnergies est désormais absorbée par Coly Energy Mali, le nouvel acquéreur de l’ensemble de ses actifs dans notre pays. Une délégation du nouvel acquéreur a même déjà été reçue, le jeudi 23 janvier 2025, par le Premier ministre, le Général de Division Abdoulaye Maiga.
La délégation est venue introduire le nouveau président du Conseil d’Administration du groupe René Hounsinou auprès des autorités maliennes. Ce départ du groupe français suscite cependant des interrogations ! Depuis un certain temps, un bras de fer opposait les travailleurs et la Direction de TotalEnergies Mali quant aux dysfonctionnements internes, au manque d’investissement et de maintenance qui affectait la performance du service, au non-respect des engagements contractuels. Les discussions avec la Direction de Total avaient un moment achoppé, mais avaient pu être relancées suite à une intervention du SYNABEF, auquel assurance avait été donnée que tous les acquis allaient préservés avec l’arrivée du nouveau preneur des actifs de la société, « un engagement contractuel étant un engagement contractuel… », avait indiqué Hamadoun Bah.
La vérité est que cette compagnie française avait elle aussi maille à partir avec les autorités de notre pays qui, conformément aux trois principes qui guident l’action publique au Mali, ont mis fin aux avantages fiscaux accordés aux entreprises françaises.
En effet, la convention d’évitement de la double imposition, qui était appliquée en faveur des citoyens et entreprises françaises opérant au Mali, n’est plus valide. Une convention qui stipulait que « chaque citoyen français ou entreprise française résidant ou opérant au Mali payait les impôts sur ses revenus gagnés dans le pays uniquement à la France ». Une situation qui profitait largement aux multinationales françaises opérant au Mali et qui faisait perdre énormément d’argent à l’État malien. Ainsi, les autorités maliennes procédaient, le 8 novembre dernier, à la fermeture de la Direction de Total pour « raison d’accumulation d’impayés fiscaux », laissant du coup les travailleurs dans une crainte légitime. Si le nouvel acquéreur de TotalEnergies s’engage à garder les 1109 agents de la société comme promis, il y a cependant lieu de se demander si on n’est pas en face des prémices d’une migration des investisseurs étrangers hors du Mali ?
Cette affaire de Total nous rappelle en effet le différend avec la société canadienne Barrick Gold, elle aussi en cessation temporaire d’activité dans notre pays, son stock d’or ayant été saisi par les autorités maliennes qui lui réclament 500 millions USD suite à des allégations de non-paiement d’impôts et de dividendes pendant plusieurs années.
Sur ce dossier, l’ancien président du Conseil National du Patronat du Mali (CNPM), Mamadou Sinsy Coulibaly, dénonçait, il y a quelque jour, la méthode de force employée par le gouvernement malien pour gérer ce dossier, toute chose qui est de nature à dérouter les investisseurs. « Ils sont aux aguets, il y en a qui voudraient ouvrir des mines en 2025, mais avec ce qui vient de se passer, je crois qu’ils vont déménager en Côte d’Ivoire. Il y aussi des miniers de classe B qui sont en train de partir… », avait déploré Mamadou Sinsy Coulibaly. Serait-on finalement dans un tel scénario ? ■
MAÏMOUNA DOUMBIA