TRANSITION MALIENNE : LES VÉRITÉS DE ME CHEICK OUMAR KONARÉ À ASSIMI ET LES SIENS
L’éminent avocat Me Cheick Oumar Konaré a versé son dossier, comme on dit, dans la marche de la Transition malienne, qu’il dit soutenir, ne serait-ce que pour avoir réussi à débarrasser le Mali de la tutelle occidentale et de recouvrer l’intégrité territoriale du Mali.
Un soutien réaffirmé malgré quelques réserves quant à «l’arrestation de citoyens à raison de leurs opinions», la poursuite contre les «personnes pour atteinte aux biens publics» privilégiée au détriment du «principe de remboursement» des sommes reprochées… et malgré le départ de son ami Choguel de la Primature. Il reste cependant catégorique sur un fait : le Mali doit négocier un nouvel accord tant avec les groupes rebelles qu’avec les groupes terroristes. La raison ? Lisons plutôt !
«J’ai soutenu la Transition malienne, non pas à partir du coup d’Etat d’août 2020, mais plutôt à partir de l’instant où elle a décidé de se débarrasser de la tutelle occidentale et de recouvrer l’intégrité territoriale du Mali, y compris la récupération de Kidal. Une tel recouvrement n’aurait jamais été possible en présence des troupes françaises et onusiennes, garantes de l’Accord d’Alger, donc de la partition de fait du Mali. J’ai donc versé des larmes de joie en voyant ces troupes quitter notre sol. Malgré le départ de la Primature de mon ami Choguel Maïga, mon soutien reste acquis à la Transition. J’ai d’ailleurs eu l’honneur de participer à l’organisation des Assises nationales, à la rédaction de la nouvelle Constitution, le tout agrémenté d’une médaille de Chevalier de l’ordre national. Cela ne m’empêche pas d’émettre des critiques sur l’action de la Transition et ces critiques, que je n’ai jamais cachées, portent sur trois points principaux :
– Fervent admirateur de la politique de feu ATT, je suis partisan du rassemblement ; à mon sens, le pouvoir de Transition devrait inclure des représentants de tous les bords politiques, de manière que les bases sociopolitiques du Régime s’élargissent et qu’aucune faction importante ne songe à combattre la Transition : mon souhait, sur ce point, n’a jamais été exaucé ;
– Je suis viscéralement attaché à la liberté; d’où mon refus d’accepter l’arrestation de citoyens à raison de leurs opinions : sur ce point, non plus, je n’ai jamais été entendu par les autorités de la Transition ;
– Enfin, j’ai toujours plaidé pour que les personnes poursuivies pour atteinte aux biens publics puissent bénéficier de l’arrêt des poursuites moyennant le remboursement, même avec intérêts, des sommes reprochées : cette pratique, qui se fait dans tous les grands pays (États-Unis, France, etc.), aurait pu renflouer les caisses de l’Etat et désengorger les prisons, mais n’a jamais été partagée par les autorités. À ces exceptions près, je partage la politique souverainiste de la Transition. Les difficultés nées de cette politique (pauvreté, crise énergétique, etc.) sont inévitables puisqu’il s’agit de dire non à des hyperpuissances mondiales. En son temps, j’avais bien prévenu qu’il fallait se préparer à boire de la bouillie de mil et à manger des beignets de haricots. Mais cette politique, pour laquelle beaucoup de nos illustres devanciers africains sont morts (Patrice Lumumba, Sylvanus Olympio, Kwame Nkrumah, Thomas Sankara, Mouammar Khaddafi), a eu pour nous deux avantages majeurs :
– Nous avons pu nous doter d’une armée digne de ce ́nom, qui compte parmi les plus puissantes de la sous-région, dans un monde où tout agneau est dévoré par les loups ;
– Nous avons appris à vivre de nos propres ressources, l’essentiel de l’aide internationale étant coupé. Cela n’a pas de prix car la rareté de nos ressources nous oblige à mieux les gérer et il n’y aurait aucun avenir pour un Mali qui mendierait sans cesse son pain. Je crois d’ailleurs au retour futur (sur des bases plus équitables) des bailleurs de fonds internationaux mais il faut, pour y parvenir, tenir une élection présidentielle (qui légitimerait le dirigeant suprême du pays) et ouvrir davantage l’espace politique, ce qui permettrait à tout le monde d’apporter sa pierre à l’oeuvre de construction nationale. Enfin, après avoir constamment combattu l’Accord d’Alger, je suis de ceux qui pensent que le Mali doit négocier un nouvel accord tant avec les groupes rebelles qu’avec les groupes terroristes. La raison ? Contrairement à 2015, nous sommes aujourd’hui en position de force pour négocier un accord favorable ; de plus, la paix définitive dépend, non des seules armes, mais du dialogue. Si difficile soit-il. Toute paix arrachée par les seules armes finit par se dégrader quand l’adversaire aura de meilleures armes. On me rétorquera que le Mali a déjà signé plusieurs accords avec les rebelles sans succès ; je réponds que ces accords étaient plutôt des diktats imposés par des puissances étrangères qui y ont inséré leurs propres préoccupations, alors que l’accord dont je rêve sera maliano-malien. On me dira que les terroristes ne sont pas disposés à la discussion : je réponds que nous devons la tenter et qu’à l’impossible, nul n’est tenu : si l’adversaire ne veut rien entendre, il ne nous laissera pas d’autre choix que celui des canons». Pour notre part, nous souhaitons que les autorités de la Transition puissent accéder à la demande de Me Cheick Oumar Konaré qui reflète largement celle de tous les Maliens soucieux du Mali, en faisant preuve de plus d’ouverture pour que les filles et les fils du se retrouvent, en élargissant les citoyens arrêtés à raison de leurs opinions et en privilégiant le principe de remboursement des sommes reprochées à la poursuite contre les personnes incriminées pour atteinte aux biens publics.
Ceci nous permettra d’aller de l’avant, et vite ! ■
MAÏMOUNA DOUMBIA