LE PM CHOGUEL KOKALLA MAÏGA L’A DÉCLARÉ LORS DU MEETING DE LA CLARIFICATION DU PROCESSUS DE TRANSITION
• « LA TRANSITION A ÉTÉ REPORTÉE UNILATÉRALEMENT, SANS DÉBAT AU SEIN DU GOUVERNEMENT »
« TOUT SE PASSE DANS L’OPACITÉ TOTALE »
Le Mouvement du 5 juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5- RFP), tendance Dr Choguel Kokalla Maïga, a organisé, le samedi 16 novembre 2024, le meeting de la clarification du processus de transition, au Centre International de Conférence de Bamako (CICB). L’objectif était de faire en sorte que tout le monde comprenne et se ressaisisse là où il y a des erreurs.
INVITATION À L’UNITÉ ET À LA RÉORIENTATION
À l’entame de ses propos, le Premier ministre et président du Comité stratégique du M5-RFP, Choguel Kokalla Maïga, a tendu la main aux dissidents. « La porte est ouverte à tous ceux qui veulent rejoindre le ‘‘Mali Kura’’. Chaque pouvoir doit rendre compte. Il faut donc parler pendant qu’il est temps. Aujourd’hui, nous avons l’obligation d’ouvrir la porte à tout le monde », a-t-il déclaré, précisant que ce meeting n’est ni fortuit ni une rencontre de plus. Selon lui, il s’explique par une triple exigence, à savoir : la commémoration de l’an I de la libération de Kidal, le 14 novembre 2023, l’impérieux besoin de clarification de la situation politique et la formulation de propositions pour une réorientation de la Transition.
BILAN DES DÉFIS ET DES ACCOMPLISSEMENTS
Il a dressé un état des lieux des défis et des accomplissements récents du Mali. D’abord, le président du Comité stratégique du M5-RFP a salué la libération de Kidal par les Forces armées maliennes (FAMa) le 14 novembre 2023, qui, pour lui, est une étape décisive après trois décennies de contrôle externe sur cette région stratégique. Il a dénoncé les ingérences françaises et les accords imposés qui visaient, selon lui, à sanctuariser Kidal pour des intérêts néocoloniaux. PAR RAPPORT À LA CLARIFICATION POLITIQUE ET AU BILAN DE LA TRANSITION Le Premier ministre a rappelé le rôle du M5-RFP dans le processus de transition et critiqué les dysfonctionnements actuels au sein du gouvernement, soulignant un manque de cohérence et de communication. Il a également abordé les menaces pesant sur les acquis de la transition, appelant à une vigilance accrue face aux retours des anciennes pratiques. « Vous avez besoin d’explications. En effet, je ne saurais l’ignorer. Nous vivons des jours où vous, militants et militantes, sympathisants et sympathisantes du M5-RFP, et, avec vous, de nombreux Maliens, avez le net et persistant sentiment que, sur la Transition malienne, plane un véritable spectre de la confusion, de l’amalgame. Ce spectre s’accompagne d’un corollaire constitué par un véritable risque de remise en cause des résultats de la lutte héroïque et de la marche victorieuse du peuple malien. Pire, et il n’est pas excessif de le soutenir, nous nous trouvons face à un risque regrettable et inimaginable il y a seulement trois (3) ans, de retour programmé en arrière », a-t-il dit.
L’URGENTE NÉCESSITÉ D’UNE PRISE DE CONSCIENCE
Selon lui, il se doit à présent de dire la vérité aux militants du M5-RFP comme il le faisait déjà régulièrement aux membres du Comité stratégique du M5-RFP. « Aujourd’hui, il y a un grand besoin de créer un vrai électrochoc afin de corriger et sauver ce qui peut l’être. Vous avez besoin de comprendre ce qui se passe, au moins actuellement dans les grandes lignes, tout en préservant l’essentiel : la marche victorieuse de la Transition malienne, le refus de tout retour en arrière ou la résurgence des anciennes pratiques contre lesquelles les Maliens se sont battus », a soutenu le PM, soulignant que, comme d’habitude, certains citoyens, à la place d’une analyse objective, vont de nouveau, de façon lapidaire, s’interroger sur les vraies intentions du Premier ministre. D’autres vont interpréter négativement et parfois manipuler de façon fantaisiste ses propos. La redevabilité et la nécessité de rendre compte Pour le président du Comité stratégique du M5-RFP, l’essentiel est de ne pas être accusé plus tard de s’être tu sur la vérité, sur les risques et menaces qui pèsent actuellement sur la Transition, en un mot, d’avoir manqué à son devoir de redevabilité. En définitive, poursuit-il, « agissant en ma qualité de mandataire, j’ai décidé de cette rencontre pour m’acquitter de mon devoir de vous rendre compte ». Il a rappelé que le destin de la Transition malienne s’est véritablement joué pendant ce qu’il serait convenu de nommer les années de braises, les deux années consécutives : 2021 et 2022. Il a fait état de l’union sacrée des Maliens contre les sanctions de la CEDEAO, dont un embargo des plus injustes et des plus inhumains. « Tous les Maliens, les Africains et tous les hommes épris de paix et de dignité, tous ceux qui aspiraient à être considérés et respectés, se sont sentis fiers de l’équipe qui composait les autorités en place au Mali depuis juin 2021, avec, à leur tête, le Président de la Transition, dont le nom est chanté dans tous les pays, sur toute l’étendue de notre planète », a-t-il martelé, en disant que, ‘‘de même que le berceau de l’humanité est l’Afrique, nous creuserons le tombeau du colonialisme en Afrique’’. Abordant les raisons pour lesquelles il a parlé d’une exigence de clarification, Dr Choguel Kokalla Maïga a indiqué que dès sa prise de fonction en tant que Premier ministre, il a axé ses efforts sur un aspect de l’action politique qu’il estimait fondamental : la création des conditions politiques pour préparer et tenir les Assises Nationales de la Refondation (ANR). L’objectif était de réunir tous les Maliens (M5-RFP, représentants des FAMa, l’ensemble des autres Forces politiques et sociales) afin de définir ensemble une nouvelle feuille de route, une nouvelle orientation de la Transition, et fixer de commun accord les priorités pour le devenir du Mali. Les Assises Nationales de la Refondation : Un tournant décisif Il a souligné qu’à l’issue des ANR, le peuple malien réuni dans toutes ses composantes a retenu l’intervalle de six (6) mois à dix (10) ans comme durée de la Transition. Le Président de la Transition, après consultation avec le Premier ministre et les responsables de la Commission d’organisation des ANR, a retenu une durée de cinq (5) ans comme base de négociation avec la CEDEAO et la Communauté internationale. La CEDEAO a fait ce qu’elle savait faire de mieux : tenter d’imposer, par procuration, au peuple malien, les conditions définies par des puissances extras-africaines. Sous le prétexte d’aider et d’appuyer le Mali, les dirigeants de certains pays dits amis du Mali ont commencé, eux aussi, à dérouler leur plan de vassalisation du Mali. Mais, face à leur destin, les autorités de la Transition, c’est-à-dire les représentants des FAMa et les dirigeants politiques restés fidèles au M5-RFP, ont fait preuve d’une forte cohésion et d’une capacité d’analyse, d’anticipation, de discernement et de détermination à toute épreuve. Ainsi, le peuple malien, rassuré, a tranché et a pris son destin en main, à l’issue du Grand rassemblement patriotique du vendredi 14 janvier 2022, dénommé plus tard : « Journée de la souveraineté retrouvée ».
LA VOLONTÉ D’INTÉGRATION SOUS-RÉGIONALE ET LA SOUVERAINETÉ RETROUVÉE
« Ayant pris notre destin en main, notre pays s’est résolument engagé au cœur de l’intégration sous-régionale constructive, avec la mise sur pied de la Confédération des États du Sahel (AES), respectueuse de la volonté des peuples du Burkina Faso, du Mali et du Niger qui ont décidé de se soustraire du paternalisme colonial et de rompre avec les chaînes de l’esclave déguisé en démocratie », a-t-il dit. Le dérapage de la Transition : Le report unilatéral Cependant, soulignait le chef de gouvernement, « malgré tous ces acquis de la Transition rectifiée, et je dois vous dire sincèrement et publiquement, ce que j’ai souvent souligné à l’intention des éminents membres du Comité Stratégique du M5-RFP. La durée de la Transition a été ainsi librement fixée à 24 mois à compter du 26 mars 2022 à la suite d’un décret signé par le Président de la Transition et le Premier ministre : Décret N°2022-0335/PT-RM du 06 juin 2022. Donc, la Transition est censée prendre fin le 26 mars 2024. Mais elle a été reportée sine die, unilatéralement, sans débat au sein du Gouvernement », a-t-il lancé. Il a précisé que « Aujourd’hui encore, il n’existe aucun débat sur la question. Le Premier ministre est réduit à se contenter des rumeurs de la presse ou à une interprétation hasardeuse des faits et gestes du Ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation. Le Gouvernement n’a aucune information sur le programme ni le plan d’actions de l’AIGE (Autorité Indépendante de Gestion des Élections). Or, la création et la mise en place de cet organe font partie des exigences majeures du peuple malien pour la réalisation du Mali nouveau, le Mali Kura ».
LA GESTION OPAQUE ET LA REMISE EN CAUSE DU PROJET DE TRANSITION
Pour lui, la mise en place de cet organe a contourné toutes les procédures normatives dans le fonctionnement d’une équipe dirigeante. Il est même étonnant que ce soient les tenants de l’ancien régime et nouveaux soutiens de la Transition qui manifestent leur satisfaction à son adoption. « Il s’agit là d’un ensemble de faisceaux qui poussent les citoyens à penser et imaginer toutes sortes de scénarios, à se lancer dans toutes sortes de conjectures sur la fin de la Transition. Aujourd’hui, il est temps que le peuple malien sache à quoi s’en tenir. Tout se passe dans l’opacité totale, à l’insu du Premier ministre. J’ai le courage et l’honnêteté intellectuelle de le reconnaître tout en le déplorant vivement. Ce n’est nullement à ma personne qu’un préjudice se trouve porté. Après tout, je ne suis que l’humble serviteur d’une cause que je considère comme sacrée : la promotion d’un Mali nouveau, du Mali Kura, débarrassé des anciennes pratiques », a déclaré le PM.
LES DÉFIS GOUVERNEMENTAUX : DYSFONCTIONNEMENTS ET QUESTIONS DE SÉCURITÉ
Mais, selon lui, la question se pose : l’efficacité de l’action gouvernementale ne se trouve-t-elle pas compromise par le dysfonctionnement qui se note entre les institutions ? Et, question subsidiaire : à qui profite le dysfonctionnement ? Assurément, pas au Peuple malien dont les préoccupations sont largement connues. En effet, a-t-il indiqué, pendant que se livre ce qui s’apparente à une guéguerre bureaucratique, la question de la sécurisation de notre pays reste dans les limbes. Ce qui est plus grave encore, selon lui, c’est qu’une situation d’insécurité persiste dans le pays, malgré des acquis militaires tangibles obtenus par les Forces armées maliennes, notamment la reconquête de Kidal et la sécurisation progressive de plusieurs régions du pays. ■
YOUSSOUF KONATE