CRIMINALISATION DE L’HOMOSEXUALITÉ ET DE SON APOLOGIE AU MALI : LES AUTORITÉS DE LA TRANSITION ONT-ELLES VERSÉ LA SAUCE DES HOMMES POLITIQUES ?
Le 31 octobre dernier, le Conseil National de Transition, sous la présidence du Général de Corps d’Armée Malick Diaw, a adopté plusieurs lois dans le cadre du nouveau code pénal et du code de procédure pénale, parmi lesquelles la criminalisation de l’homosexualité et de son apologie au Mali.
Si certains acteurs politiques ont de façon codée salué l’adoption du nouveau code pénal, nul parmi eux n’a encore à ce jour salué ni même osé donner son avis sur la loi opprimant l’homosexualité au Mali. Qu’est-ce qui dérange tant ? Les nouveaux textes étaient défendus devant le CNT par le ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux, M. Mahamadou Kassogué. Il avait déclaré à cette occasion que des dispositions sont prises en compte dans les nouveaux projets de loi portant code pénal et code de procédure pénale, selon lesquelles il est dit que nous ne sommes pas d’accord avec l’homosexualité et que nous ne serons pas d’accord pour sa pratique dans notre pays. « Toute personne qui la pratique sera poursuivie et celui qui fait son apologie pour dire que c’est une bonne chose, sera poursuivi également.
C’est dire que nous ne sommes pas d’accord pour que nos valeurs soient changées par d’autres personnes », avait-il dit, tout en précisant que notre honneur et nos valeurs culturelles ne nous permettent pas certains faits de ce genre.
Toute chose qu’il a toujours affirmée bien avant l’adoption des nouveaux textes, comme ce fut le cas lors de la validation de l’avant-projet de code pénal et de code de procédure pénale, qui s’est tenue à l’hôtel Maeva. « L’homosexualité est une relation contre-nature. Notre loi ne la permet pas, mais il n’y avait pas de sanctions précises. Maintenant, nous allons prendre des sanctions pour l’interdire dans notre pays. Il y aura des sanctions contre tous ceux qui la pratiquent », avait alors confié le ministre Kassogué. Soulignons également qu’un débat houleux a opposé les professionnels du droit sur la terminologie à utiliser dans la répression des « pratiques attentatoires » aux mœurs dans la société malienne. Comme nous l’avons dit, de l’adoption des nouveaux textes à aujourd’hui, aucun homme politique d’envergure au Mali n’a voulu se prononcer sur le sujet spécifique de la criminalisation de l’homosexualité et de son apologie dans notre pays. Ce qui a quand même donné l’occasion à Issa Kaou Djim de se décharger, sur Joliba TV, sur Moussa Mara, qui serait son ennemi politique juré en Commune IV du District de Bamako. En effet, saluant un tournant dans l’évolution de la justice malienne, Issa Kaou Djim avait allégué que Moussa Mara ne pouvait saluer la criminalisation des relations contre nature et s’en réjouir aussi ouvertement, à cause de ses affinités avec l’Occident et du risque qu’il courait d’être privé d’éventuels soutiens en précampagne. Issa Kaou Djim aurait dû avoir le courage d’élargir son angle de tir à la quasi-totalité des acteurs politiques maliens, car si certains ont vaguement salué les nouveaux textes portant code pénal et code de procédure pénale, aucun d’eux n’a évoqué le cas spécifique de l’interdiction de l’homosexualité dans notre pays.
Pourtant, il va bien falloir qu’ils s’y prononcent maintenant ou après, du moment que les nouveaux textes les engagent tous, tout autant que la criminalisation de l’homosexualité et de son apologie.
Qu’ils le veuillent ou non, ils seront butés à ce sujet dans les jours à venir, notamment avec les partenaires étrangers et autres bailleurs de fonds. En fait, ils font face à une danse de la mort : composer avec les Maliens au détriment d’éventuels partenaires récalcitrants ou inversement ! Mais la véritable mort politique sera pour celui d’entre eux qui osera, une fois accédé au pouvoir, vouloir dépénaliser la pratique de l’homosexualité au Mali… Alors question : les autorités de la Transition ont-elles versé la sauce de nos hommes politiques ? Le débat reste ouvert ! ■
MAÏMOUNA DOUMBIA